Actualités Orthophoniques Mars 2000 (volume 4, n°1)
A la différence des romans de fiction ou des essais politiques, on est rarement déçu par les livres destinés aux enfants. Sans doute, le graphisme est-il parfois excessif, insignifiant ou post-futuriste.. Parfois aussi l’histoire n’a qu’un intérêt limité, ou bien le vocabulaire manque de finesse, voire se complait dans le « parler mode », ou encore la leçon de l’auteur l’emporte sur le plaisir des mots.
Mais on trouve en général un intérêt dans tout livre.
Sauf dans celui-ci.
Le titre était alléchant pour un orthophoniste : « Zéro de lecture ». On s’attendait donc à découvrir, avec humour, les déboires d’un enfant en mal d’apprentissage de lecture, voire carrément dyslexique. On imaginait mis en scène à la fois les difficultés de l’enfant face à ses copains de classe et à ses parents, sans parler de la maîtresse et son plaisir enfin trouvé à parcourir les sentiers des premières syllabes et jusqu’aux autoroutes du dictionnaire..
Que nous propose-t-on ? une histoire complètement invraisemblable mettant en scène un père falot, non sorti de son enfance, bien peu responsable mais écrivain…ce qui lui donne sans doute le droit de ne jamais élever la voix, de passer son temps avec ses copains écrivains devant une bière et d’aller complètement dans le sens de son rejeton qui a décidé « de ne pas apprendre à lire ». Le gamin (dont on ne sait pas réellement pourquoi il s’est buté a priori contre la lecture…) n’est guère attachant pour le lecteur. Son attitude apparaît incompréhensible et capricieuse et son volte-face final ne semble être lié qu’à la médiocrité reconnue de son père.
L’auteur, tout entier perdu dans les pires brumes soixante-huitardes, a sans doute profité de l’écriture de ce livre pour s’offrir une psychanalyse sauvage au rabais. Tout sent le convenu babacool (dans le mauvais sens du terme), y compris le dessin. L’enfant est visiblement copié (et de près) sur le Petit Prince et une telle caricature (salopette, coupe de cheveux et air niais.. ) se découvrira bien rarement dans les vraies cours de récré. Quant au père, il est à pleurer d’adolescence attardée….
Visiblement, une mère aurait remis de l’ordre dans cette histoire particulièrement ratée…. A moins qu’un homme, un vrai….
(Christophe HONORE, Editions l’Ecole des Loisirs, 1999, 72 pages, 40FF)