Understanding communication from the perspective of persons with dementia (suite)

Actualités Orthophoniques Décembre 2002 (volume 6, n°4)
Comme nous l’indiquions dans la présentation de la première partie de cet article (voir numéro de Septembre 2002, page 19), il y a fort à apprendre dans la lecture des textes écrits par les malades.
Ainsi lorsque Jean écrit à destination de sa famille « Ne me prenez pas pour un bébé et ne prétendez pas que je n’ai pas la maladie d’Alzheimer » et des ses amis « Laissez moi parler, même de cette maladie. Que je sois en colère ou triste, écoutez moi, c’est juste ce que je vous demande ».

Booker écrivait : « Si j’oublie quelque chose, je souhaite que l’on soit doux avec moi…Traiter les autres comme vous aimeriez que l’on vous traite »

Dans cet article, l’auteur décrit ensuite les différentes étapes de la maladie.

1 – Au stade initial, qui peut durer plusieurs années,

* La forme et la structure des messages demeurent globalement intactes.
* Par contre le contenu se modifie peu à peu. La recherche du bon mot, ou simplement du mot, dure de plus en plus longtemps ;
* Le vocabulaire semble se rétrécir, se simplifier, avec de plus en plus de mots passe-partout du genre « chose » ou « machin ». Toutefois, leurs difficultés n’apparaissent que lors de conversations longues, et ils peuvent faire illusion dans des échanges simples et brefs.
* La cohésion du discours se dégrade peu à peu, avec une sur-utilisation des pronoms, rendant difficile le suivi d’une conversation lorsqu’on ne sait pas de qui on parle et à propos de quoi…
* Bien entendu les oublis concernent également ce qui vient d’être dit et les patients ont tendance à répéter le même sujet, ayant oublié qu’ils l’ont déjà indiqué.
* L’humour et les blagues posent rapidement problème car les patients prennent ce qui est dit au pied de la lettre, étant offusqués ou se sentant insultés par les propos qui devraient être pris au second degré.
* La lecture pose des problèmes lorsque le texte est long et/ou complexe. Par contre, montrer des consignes écrites peut être une bonne facilitation.
* Les mécanismes de l’écriture et de l’orthographe sont préservés. Par contre l’organisation d’un texte à écrire peut rapidement poser des problèmes.

Les débuts de la maladie sont souvent discrets. Les patients commencent à oublier certaines choses mais ils mettent cela sur le compte de l’âge ou de la fatigue. Ils en parlent souvent à quelqu’un attendant de cette demande un soulagement du genre « ce n’est rien , tu t’inquiètes pour rien ». Mais bien sûr, peu à peu, les choses se dégradent et tout l’entourage remarque les erreurs. Les patients évoquent ces difficultés dans leurs écrits :

• « Pourquoi est-ce que je ne me rappelle plus de son nom ? Pourtant, je le connais depuis des années. »

• « Je note sur le calendrier lorsque je prends mon médicament. Comme il n’y a rien de marqué, c’est que je ne l’ai pas pris ».

• « Est-ce que je t’ai dit ce qu’elle m’a raconté ce matin ? Ah, je te l’ai déjà dit …Pourtant je n’avais pas l’impression de te l’avoir déjà raconté… »

2 – Au stade intermédiaire, qui dure en moyenne trois années, les choses se détériorent rapidement.

• Les capacités langagières se détériorent rapidement et l’auteur place le langage au niveau d’un enfant de 5 à 7 ans.

• Certains éléments restent préservés comme le cadre général du message, l’intention de communiquer, la lecture à haute voix ou la mécanique de l’écriture. Les patients peuvent comprendre une information écrite ne comportant qu’un seul mot. Ils peuvent suivre une consigne simple. Les phrases automatiques ainsi que les éléments sociaux semblent préservés de même que la notion de tour de parole.

• Les messages ont un contenu limité et moins complexe. On a l’impression que le patient a moins de choses à dire.

• Les messages sont moins efficaces : il faut beaucoup de mots pour peu d’idées.

• Les patients démarrent sur une idée et la perdent en route, donnant naissance à des messages vides.

• La conversation est difficile à suivre et les mêmes idées sont souvent répétées.

• La compréhension, orale et écrite, est perturbée. Il faut rester dans le concret et l’explicite.

• Dans le décodage des messages, l’intonation, le contexte et les gestes prennent davantage d’importance pour l’interlocuteur. Les soignants doivent se créer une sorte de code, permettant de comprendre le patient plus par son intention que par le contenu formel du message.

3 – Le stade final dure environ deux années. Le langage s’appauvrit et fait penser à celui d’un enfant de 2 ans.

Le patient est dépendant des autres et nécessite une présence vigilante et constante.

* La forme des messages peut être globalement préservée, bien que très simplifiée.
* L’intonation est sans doute ce qui persiste le plus longtemps.
* Les phrases sociales peuvent apparaître encore.
* Par contre, le patient n’a plus le sens de la communication. Il peut par exemple parfois parler longuement avec une peluche.
* La « conversation » n’a plus de sens, avec un mélange de mots rares et de non mots. On parvient parfois à comprendre un mot significatif d’une idée.
* Il y a un trouble majeur de la compréhension orale et écrite.
* Seuls l’intonation, le contexte, le ton de la voix et le toucher constituent des éléments d’information.

Les besoins des patients se résument en fin de maladie à des éléments de confort : on leur parle, on leur sourit, on les étreint, on les remue. Ils ne comprennent plus les mots. Par contre ils réagissent à la voix et au toucher qui va les calmer si nécessaire. Ils ne reconnaissent plus les proches et deviennent mutiques. Ils n’expriment plus de besoins et il est donc nécessaire d’anticiper en permanence.

Un certain nombre de points, contenus dans la « Boîte à outils » du mois de Septembre (p.51-53), forment une armature indispensable à toute prise en charge d’un patient avec une maladie d’Alzheimer : le respect, l’écoute permanente par tous les moyens, l’adéquation de ses productions avec les capacités du patient, la patience, l’échange. Encore plus que dans d’autres types de prise en charge, celle-ci nécessite de notre part une finesse de travail et une attention soutenue.
Nancy HAAK

Alzheimer’s care Quarterly, Printemps 2002.