The Picture Exchange Communication system

Actualités Orthophoniques Juin 1999 (volume 3, n°2)
L’autisme est souvent diagnostiqué entre 2 et 4 ans. Les principales caractéristiques sont bien connues : peu ou pas de parole fonctionnelle, un regard fuyant, une grande difficulté à imiter des mots et des actions, une quasi incapacité à entrer en contact avec ses camarades ou avec des adultes, des réponses peu appropriées voire absentes à la communication sociale, un très faible intérêt à ce qui se passe autour de lui. 25 à 61% (selon les études !) des enfants autistes restent mutiques. Lorsqu’il y a production orale, elle est marquée par de l’écholalie, des persévérations et des difficultés de prosodie.

Une autre caractéristique majeure est la difficulté d’interaction sociale, quelle soit langagière, ludique ou simplement de contact. Par exemple, un enfant « normal » va « interpeller » l’adulte (y compris pour les plus jeunes, se tourner vers lui) lorsqu’il remarque quelque chose d’anormal ou d’inhabituel. L’adulte adressera alors une réponse. Ce n’est pas le cas chez l’enfant autiste (au delà de son déficit langagier) et l’interaction ne se bâtit donc pas avec l’adulte. De même, l’imitation (vocale, motrice ou de manipulation d’objets) est fréquemment absente.

Face à ces troubles majeurs, la thérapie habituelle repose sur trois approches :

• La production de parole.

Dans la mesure où la plupart des enfants entrent à l’école sans savoir parler, il était compréhensible que la thérapie commence par cet aspect.

Toutefois, il est impossible d’intervenir tout de suite sur l’imitation de mots. Il faut au préalable travailler en amont pour préparer l’enfant : en fait il s’agit de lui apprendre à être prêt, avant de travailler sur le contact visuel, puis sur l’imitation, puis sur la production…

Il est également possible de travailler sur des consignes très simples, accompagnées d’un indice, qui permettra de rehausser l’attention de l’enfant autiste : par exemple, « tape dans tes mains », ou « pose cette poupée » ou « donne moi la même »…

Mais ceci n’est en aucun cas spontané. Et même si l’enfant parvient à parler, il ne pourra pas démarrer une conversation, dans l’attente de l’indice de l’adulte.

• La langue des signes.

Les indices visuels ont l’avantage de durer (à la différence des indices auditifs). Mais la limite de cette méthode vient de la limitation des interlocuteurs qui doivent eux-mêmes connaître ce type de langage.

• Les pictogrammes de communication.

Il faut tout d’abord faire accepter à l’enfant la notion d’appariement (même dit autrement…) en commençant par des échanges d’objets réels, puis en choisissant des images. Mais ceci n’a guère de lien avec la vie réelle (un simple exercice) et de plus c’est toujours l’adulte qui initie la communication (« trouve le même », « que veux-tu ? »…)

Le système de communication par échange pictographique (PECS) est donc proposé dans cet article.

Pour qu’un système d’apprentissage de la communication soit efficace, il faut selon les deux auteurs que :

• il utilise des renforcements efficaces

• il débute par la communication spontanée

• il évite le développement d’une dépendance des indices de départ

• il ne nécessite pas un long apprentissage.

Avant donc d’utiliser le PECS, il est indispensable de mieux cerner les renforcements qu’apprécie l’enfant. Il existe des évaluations formelles dans ce domaine, mais il est également possible de se contenter de données empiriques, par exemple en proposant à l’enfant deux objets et en notant celui qu’il préfère.

Le PECS doit absolument débuter par obtenir une demande de l’enfant pour un objet réel. Si on place un bonbon devant l’enfant, sa réaction naturelle va être de le prendre. De même si on met une image devant lui. Il va donc falloir détourner cela et aider l’enfant à « demander », tout en évitant les « indices » trop directs de la part de l’adulte (comme « montrer l’image du doigt », ou « dire – donne moi l’image – »…), afin de préserver la spontanéité nécessaire. Il est par contre possible de positionner l’objet ou l’adulte de plus en plus loin de l’enfant pour qu’il soit « obligé » d’agir.

Durant cette période du PECS, l’accent est uniquement mis sur la nature de la communication, non sur les items. Notons qu’il faut également travailler sur le contact visuel lorsque l’acquisition de la notion de demande s’est faite.

Dans un deuxième temps, lorsque l’enfant est devenu un bon communicateur spontané, on va travailler sur la discrimination entre les éléments.

On commence par deux items très différents en ce qui concerne le renforcement obtenu (l’exemple d’un bonbon et d’une chaussette est proposé). Si l’enfant reçoit le « mauvais » renforcement (par un mauvais choix d’image…), il va falloir adapter l’exercice. Soit en re-demandant un choix, soit en insistant sur les conséquences d’un « mauvais » choix (on obtient un mauvais renforcement…).

Parfois aussi l’enfant ne fait guère de choix. Il va falloir par d’autres moyens l’aider à se déterminer dans ses choix afin de préciser sa demande.

Lorsque l’enfant peut discriminer cinq éléments, il est temps de passer au cahier de communication.

La première phase du PECS était donc centrée sur la demande. La suivante va s’intéresser au commentaire. Lorsqu’un enfant dit un mot, on comprend souvent au son de sa voix s’il s’agit d’une demande ou d’un commentaire. Mais dans un système d’images, il va falloir ajouter un icône spécifique qui va préciser la pensée, du genre « Je veux »ou « c’est »/ »je vois ». Mais pour éviter un nouvel apprentissage d’un icône hors du contexte, les auteurs proposent un « ruban-phrase ». On va apprendre à l’enfant à former une phrase en attachant deux icônes au ruban : un icône représente « Je veux » et l’autre, l’objet. L’enfant remet à l’adulte le ruban et ce dernier peut le « lire » puis répondre à la demande. Cette méthode a été utilisée avec succès avec des enfants de 8-13 ans très handicapés.

Tout un travail gradué est présenté par les auteurs afin d’inciter l’enfant à « parler » d’un objet, sans le demander obligatoirement. Une procédure reposant sur un geste d’incitation est également proposée.

Dans un autre domaine, les auteurs font également part de la diminution des problèmes de comportement après l’apprentissage du PECS, en particulier des pulsions agressives.

Enfin, une étude spécifique montre que le PECS semble faciliter l’accession à la parole. En effet, après un laps de temps de plusieurs mois (8,5 mois en moyenne dans l’étude de Bondy), les premiers mots apparaissent souvent. En général cela se fait lors d’un échange par ruban-phrase. Selon la même étude sur 66 enfants qui ont utilisé le PECS durant plus d’une année, 60% ont développé la parole (30% parlaient déjà). L’interaction entre PECS et parole n’a pas pu être expliquée mais elle existe dans les faits.

Pour en savoir plus :

Les textes relatifs à ce sujet ont essentiellement fait l’objet de communications dans les Congrès ou d’articles dans des Revues très spécialisées.

A . BONDY et L. FROST

Seminars in speech and language, 1998,vol.19,n°4