Actualités Orthophoniques Décembre 2003 (volume 7, n°3)
L’intention est louable : mettre à la disposition des cliniciens un bilan de dysorthographie étalonné du CE1 à la 3 ème … ce qui manque de façon évidente dans le paysage des tests actuels. De plus, ce bilan permettrait une analyse quantitative (et donc de mettre en évidence la sévérité des troubles) et une analyse quantitative (permettant de mettre sur pied un projet individualisé de rééducation).
Auteurs : C. De Plazaola, F. Gauthier, MF Arsicaud et C. Pech-Georgel
Ed. SOLAL, 80 p., 23 ?
L’ensemble du bilan est basé sur une dictée, plus ou moins longue selon les classes. On passe ainsi de 4 lignes au CE1, 6 lignes pour le CE2 à 22 lignes pour le CM1 et 24 pour les classes suivante. On peut se poser la question d’un si grand écart et surtout d’une si importante longueur de dictée pour déceler les différents troubles. Asséner à un enfant dysorthographique de 9 ou 1O ans un texte si long semble tout de même un peu un contresens…ou un acharnement. Mais sans doute les auteurs avaient-ils besoin de nombreux items pour analyser très finement les erreurs.
Notons également que le texte choisi concerne le Petit Poucet « conte qui reste bien investi par les enfants et continue à susciter un intérêt notable chez eux »…. Les enfants marseillais auraient-ils une culture particulière (en dehors de la légitime dévotion à l’OM) ? En discutant avec nos collègues de différentes régions, nous n’avons guère retrouvé cette connaissance pour ce petit bonhomme. Mais après tout, qu’importe le flacon pourvu qu’on ait l’ivresse, c’est-à-dire le décorticage des difficultés.
L’analyse statistique permet de mettre sur pied pour chaque classe des tableaux qui indiquent pour chaque élément qualitatif les notes moyennes obtenues, les écarts types et donc le seuil de pathologie (2 écarts type en primaire et un écart en secondaire).
Il suffit donc de se reporter aux tableaux, sans calcul supplémentaire, ce qui est très agréable lorsque l’on vient de coter (longuement) un LMC-R….
Il est ainsi possible de préciser avec une apparente facilité les différents déficits, de confirmer ou d’infirmer la réalité d’une pathologie et de préparer un plan de rééducation. Notons d’ailleurs que pour mieux éclairer notre lanterne, les auteurs présentent un cas par classe, avec la transcription de la dictée, le tableau des erreurs et le tableau statistique. Ceci permet à l’évidence un bon entraînement….
Venons-en aux différents modules de l’analyse qualitative :
• Le système phonologique
Il comprend quatre éléments :
• le code phonologique avec :
• les règles de la combinatoire
• les sons vocaliques complexes
• La terminaison des verbes au participe présent en « ent »
• Les omissions, substitutions, adjonctions auditives
• omission de phonèmes
• substitutions auditives
• adjonctions de phonèmes
• Les confusions visuelles
• Les inversions et assimilations
Je n’aurai pas l’impudence de vous donner des exemples, et d’ailleurs vous en trouverez plein dans le livre…
• le contrôle sémantique
• erreurs de pronom avec congruence
Avec toute la timidité que requiert ma méconnaissance, je ne vois pas en quoi il s’agit dans ce cas (par exemple : « il n’osaire » pour « ils n’osèrent ») d’une erreur de type sémantique. Et comme ces erreurs ne sont ni légion ni significatives, fallait-il leur accorder un statut à part au risque de complexifier encore le tableau des erreurs.
* erreurs d’homophones
Le grand classique sur lequel s’échine depuis longtemps des générations d’orthophonistes…
• erreurs d’individualisation
• créations de barbarismes
C’est une rubrique un peu fourre-tout et pas très bien individualisée : on y retrouve les mots qui n’existent pas dans la langue (mais pas « il n’osaire » qui pourtant ne semble guère exister en français) mais aussi ceux qui recèlent au moins deux erreurs et apparaissent ainsi trop éloigné de leur cible (par exemple « lécet » pour « laissait »).
• Les compétences morpho syntaxiques
• Utilisation anarchique du genre et du nombre
Cette catégorie regroupe les oublis, ajouts ou erreurs sur les « bons mots » mais aussi les marqueurs sur une catégorie inadéquate (par exemple le « s » au pluriel des verbes).
• Non-respect de l’homogénéité du groupe nominal
En ce qui concerne l’accord genre/nombre
• Non-respect de la suffixation pronominale
Sous ce terme abscons se cache simplement la non-concordance sujet-verbe !
• Non-respect de la suffixation temporelle
Que l’on pourrait noter « erreurs dans le respect de la conjugaison »…
• Non-respect de la suffixation modale
Idem à d) sauf qu’il s’agit ici du mauvais mode de conjugaison
• Confusion de désinences en « é »
Un lot qui regroupe toutes les inventions que peuvent produire les enfants lorsqu’ils sont confrontés avec ces affreux « é » qui parsèment notre orthographe de façon à les faire se tromper…
• Confusion nom-verbe-adverbe
• Le Stock lexical orthographique
Ou les fautes d’orthographe d’usage… quand la phonologie est respectée et quand il n’y a pas plus de deux graphèmes altérés (sinon on passe au barbarisme… !!).
Concluons par quelques remarques :
• l’intérêt d’avoir un test étalonné pour toutes les classes est indéniable.
• Le passage à une dictée longue dès le CM1 ne semble pas opportun. D’ailleurs le nombre moyen d’erreurs devient très important en particulier dans les catégories morphosyntaxiques, preuve que la dictée est mal adaptée à ce niveau (les choses rentrent en ordre en sixième).
• Certaines catégories d’erreurs ne vont pas de soi et restent ambiguës lors de la cotation (malgré les exemples et explications), sans pour autant apporter un élément nouveau pour la rééducation.