Actualités Orthophoniques Juin 1999 (volume 3, n°2)
Voici de toute évidence un pavé :
• pavé car la densité de ce numéro de 66 pages est bien réelle (et c’est écrit en petits caractères…pas de pitié pour les presbytes)
• pavé…dans la mare car les thèses développées ici méritent toute notre attention. Ce dossier (on dirait plutôt un rapport) traite des troubles d’apprentissage et pourtant ne cite qu’exceptionnellement le mot « orthophoniste ». Raison de plus pour nous y intéresser de fort près. D’autant qu’à plusieurs reprises, on déplore « une prise en charge inappropriée ». et on rajoute pour ceux qui n’avaient pas bien compris « par insuffisance du dépistage, les enfants sont pris en charge de façon inadaptée ». Ou bien quelques lignes plus loin « Il existe en France un manque d’information et de formation à propos des troubles d’apprentissage que ce soit pour les professionnels de santé ou les enseignants »… Et alors les orthophonistes, vous faites quoi de vos journées ? ? ?
On retrouve ici la « griffe » d’un certain courant, extrêmement respectable dans ses attentes mais sans doute un peu trop prompt à nier tout ce qui se fait au quotidien.
Mais peut-on accepter en permanence cette suspicion globale sur notre profession ? Qu’avons-nous fait (ou pas fait) qui nous voue collectivement aux gémonies des grands imprécateurs ? Ne faudrait-il pas rappeler que l’orthophonie se pratique essentiellement en exercice libéral et donc de façon individuelle et individualisée et qu’en fait rien n’autorise à critiquer la profession lorsque l’on veut en critiquer tel ou tel membre ? que certaines orthophonistes manient plus ou moins bien les méandres scientifiques de tel ou tel trouble, cela n’est que normal, de même que certains enseignants préfèrent les maths ou le dessin, que certains psychologues sont psychothérapeutes ou cognitivistes, et qu’on ne le leur reproche pas ce choix…
Que certains n’aient pas su s’adapter aux évolutions et aux données récentes n’est que le fait du naturel dans n’importe quelle profession…
Mais avant de jeter une fois de plus l’anathème sur nous tous, lisez les mémoires récents, renseignez – vous sur les formations initiale et permanente actuelles, interrogez les parents des milliers d’enfants qui ont « survécu » à l’orthophonie et n’imaginez surtout pas qu’il suffit d’avoir des idées pour les administrer au quotidien. Ce passage là est souvent si ardu que personne (médecin, neuropsychologue, psychologue…) ne s’en mêle et laisse « gentiment » les orthophonistes se débrouiller tout seul au jour le jour.
Bien sûr, loin de nous l’idée que nous ne pouvons progresser, voir les choses autrement, évaluer différemment, rééduquer plus finement. D’ailleurs la conscience phonologique, pure merveille de la science moderne, est facilement entrée dans nos m?urs. Mais de grâce, à moins que ce ne soit qu’une volonté d’occuper le terrain des autres, imaginez qu’avant vous il y avait des choses faites et tout, bien loin de là, n’était pas si misérable que cela.
Voilà, je m’emballe et je n’ai plus de place pour vous parler du dossier lui-même. Mais je sais que vous serez fidèle au rendez-vous de Septembre et que nous pourrons ainsi aborder en détail l’essentiel de ces pages.
ADSP – actualité et dossier en santé publique, 1999, n°26,
La Documentation Française , 75FF