Revue de Presse de la Fondation Méderic Alzheimer
Novembre 2012 – N°87
Commentaires (libres) tirés de l’indispensable revue de presse de la Fondation Méderic.
NDLR : mais à quoi peut bien nous servir tous les à-propos qui suivent… ? Parlez-nous plutôt de rééducation….. D’abord on vous en parle dans les synthèses d’articles proposés régulièrement dans les « Ressources ». Ensuite, prendre en charge un patient Alzheimer n’est pas que technique, voire même peu de technique visible. Et comme l’important se déroule au sein même de la vie du patient et de son entourage, qu’il faut tenter d’optimiser, il est bien utile de connaître tout l’environnement (au bon sens du terme…) afin, sinon d’agir, du moins de savoir, ce qui ne pourra que renforcer votre façon de faire et d’être.
- A propos des déments institutionnalisés…
Une étude réalisée à partir des données (recueillies par les médecins coordonnateurs et portant sur près de 60000 personnes dans plus de 900 lieux d’hébergement)) du système d’information Pathos met en évidence des chiffres impressionnants de « malades » dans les USLD et les EPHAD.
38% des personnes déambulantes sont atteintes de démences dans les EPHAD. Au total, un syndrome démentiel est visible chez 66 % des patients des USLD et 53% dans les EPHAD. Des troubles du comportement apparaissent chez la moitié des patients et un état dépressif chez 4 patients sur 10. Les problèmes digestifs « hauts » (entrainant de fausses routes) concernent entre 42 et 32% des personnes. Enfin, 84% des patients en USLD et 56% en EPHAD sont classés en GIR 1 ou 2, donc dépendants.
- A propos de la réserve cognitive…
Le concept de réserve cognitive a été souvent évoqué pour expliquer l’inégalité entre les personnes face à la maladie d’Alzheimer. « Conserver une activité intellectuelle, même à un âge avancé, retarde la survenue de la maladie » selon Y. Stern. « Un niveau universitaire retarde l’échéance d’au moins cinq ans. Plus d’éducation, cela veut dire plus de synapses, un cortex plus épais, plus de possibilités de compensation » selon le Professeur Orgogozo.
« Mais la suractivité compensatrice finit par s’épuiser et le déclin s’amorce d’autant plus brutalement et plus vite».
- A propos de la prévention…
Conserver une fonction cognitive de qualité même en vieillissant est un rêve pour chacun de nous….Une étude réalisée à Toulouse (sous le nom de MAPT = Multi-domain Alzheimer’s preventive trial) s’intéresse à une intervention multiple pouvant retarder le déclin cognitif des personnes âgées et fragiles.
Il s’agit d’une intervention regroupant des conseils en nutrition, des exercices physiques, de la stimulation cognitive et des activités sociales (avec un zeste d’omega 3 !!). Les premiers résultats semblent montrer un fonctionnement frontal plus efficace chez les sujets MAPT… A suivre !
- A propos du diagnostic…
Le moment du diagnostic est fondateur dans le cours de la maladie d’Alzheimer. Et il est hélas assez souvent mal réussi !Ce qui rejaillit nécessairement sur notre prise en charge.
Une étude britannique (d’après une revue d’une centaine d’articles qualitatifs sur ce sujet) identifie trois thèmes :
– « le parcours jusqu’au diagnostic, avec son impact sur l’identité, les rôles et les relations »
– « la résolution des conflits pour s’habituer au diagnostic »
– « les stratégies et le soutien pour minimiser l’impact de la démence.
Les obstacles importants au diagnostic sont la stigmatisation, la normalisation des symptômes et le manque de connaissances.
Un soutien spécialisé devrait être mis en place après le diagnostic.
- A propos de la prise en charge de l’apathie…
Une étude niçoise (eh oui ! il n’y a pas que le carnaval et la mer, mais aussi la remarquable et très active équipe du Professeur Robert dans cette ville) s’est intéressée aux patients déments ET apathiques. On sait que ce trouble du comportement existe mais, d’une part parce qu’il ne perturbe pas les équipes soignantes d’autre part parce qu’il est peu évalué, il reste méconnu. NDLR : Pourtant cela peut être un comportement perturbant lors de notre prise en charge et dans les conseils de vie.
12% des résidents des EPHAD étudiés présentent une apathie significative qui devrait donner lieu à une intervention spécifique comme cela devrait être le cas dans un PASA.
Il est nécessaire au préalable de tenter de comprendre les origines souvent variées de ce trouble : douleur, fatigue somatique, protection psychique… Ensuite il ne s’agit pas de stimuler à tout prix et en continu… mais bien de valoriser les prises d’initiative, d’augmenter l’engagement dans des activités tout en tenant compte des rythmes de vie et des intérêts personnels. La stimulation c’est bien, l’agitation bien moins !
- A propos de la fin de vie…
Dans certains cas, nous sommes présents très loin dans la vie des patients Alzheimer, au seuil de leur mort. Et il est bien indispensable d’avoir les idées claires… et quelques connaissances avant d’aborder de façon à la fois raisonnée et sereine cette étape de la vie de nos patients…
Un certain nombre de contributions de professionnels a été collationné par l’EREMA (Espace National de réflexion éthique sur la maladie d’Alzheimer) dans le cadre de la mission présidentielle sur la fin de vie (rapport Sicard).
Celles de la psychiatre Véronique Lefebvre des Noettes sont particulièrement significatives. « Comment ne pas se sentir déjà mort dans un service de soins de longue durée où rien ne ressemble à ce qu’il (le patient) avait pu imaginer : mort sociale, mort cognitive, mort physique,… »
Ou celles de la psycho-gériatre Geneviève Demoures « le patient dit dément est un familier de la mort. Il vit des deuils depuis longtemps : ceux de sa vie passée… et ceux du présent. » « Au présent, le malade connaît le deuil de la parole, de la communication, l’échec de la rencontre… »
Ou celles de Luc Ribeaucoup, médecin en soins palliatifs « Cette dernière (la personne malade), aussi entravée soit-elle par les divers handicaps causés par la démence ne doit pas être oubliée et s’effacer devant les expertises médicales, le ressenti des soignants et des proches. Car cette personne, au delà de son statut de patient, même aphasique, dit souvent quelque chose. Elle demeure en mesure de manifester une réaction, une émotion, un ressenti face à tel type de soin, devant telle situation morbide ».
Si vous voulez approfondir ce passionnant domaine, y compris dans un but personnel, vous pouvez rejoindre la page d’accueil de la consultation puis aller lire chaque contribution, comme les trois mentionnées ci-dessus.
http://www.espace-ethiquealzheimer.org/alzheimer_consultation_fin_de_vie.php
- A propos de la « rivière sans retour »…
Bernard Rombeaut est l’époux de Marie-Madeleine, atteinte d’Alzheimer depuis dix ans. Il témoigne de la maladie, de « leur lente descente sur cette « rivière sans retour ». « Mais la maladie d’Alzheimer n’est pas le deuil d’une vie normale et l’enfermement dans la maladie. La démence peut survenir mais elle ne représente pas forcément le quotidien. La rivière sans retour a des rapides et des vents mauvais mais aussi des méandres calmes où l’eau est claire et où il fait encore bon vivre et vieillir ensemble ».
A méditer pour ne pas imaginer qu’il n’y a QUE des déficits chez un malade…
- A propos des déficiences sensorielles…
De nombreuses personnes âgées ont des limitations sensorielles qu’ils considèrent comme inhérentes à l’âge et donc simplement inconfortables. Mais la dépendance sensorielle est de toute évidence un accélérateur de dépendance qui génère quasi mécaniquement isolement, chutes, dépressions.
Pour mémoire, et ces termes seront explicités dans un prochain article….
- USLD = Unité de soins de longue durée.
- EPHAD = Etablissement d’hébergement pour personnes âgées dépendantes.
- PASA = Pôles d’activités et de soins adaptés