Development and assessment of school-age and adolescent children with human immunodeficiency virus

Actualités Orthophoniques Septembre 2000 (volume 4, n°3)
Les effets de la séropositivité et du SIDA chez des enfants sont étudiés depuis plusieurs années aux USA, y compris par des orthophonistes. Les prises en charge spécifiques existent également, tant dans les hôpitaux qu’en milieu scolaire. Etant donné la quasi-inexistence de ce type d’études en France, il nous a semblé utile de vous présenter cet article, sachant que tout le numéro de cette revue est consacré à ce thème.

Il y a une dizaine d’années, la plupart des enfants infectés par le SIDA n’atteignait pas l’âge scolaire. Aujourd’hui, grâce au dépistage durant la grossesse et aux médicaments, l’âge de survie moyen est de 9 ans. Et il y a de plus en plus d’adolescents survivants.

Cette population est très hétérogène comme le montrent certaines études.

Dans l’étude de Grubman (1995), sur 42 enfants de 9 à 16 ans, un quart n’avaient aucun symptôme et un système immunitaire assez bien conservé. Les autres étaient séropositifs ou avaient développé le SIDA. Mais seulement 57% savaient qu’ils étaient infectés par le virus. 64% avaient un examen neurologique normal dont 5% montraient des troubles auditifs isolés. 12% avaient des troubles de l’attention, 12% présentaient un déficit développemental et 12% montraient une encéphalopathie. 24% seulement étaient dans des classes spécialisées mais près de 30% avaient un retard scolaire. C’est dire que toutes les situations peuvent exister dans ce domaine.

Les troubles neurologiques se trouvent plus souvent chez les plus petits. Il semblerait que les enfants dépassant 4 ou 5 ans sans troubles neurologiques avérés seraient nettement moins enclins à en développer par la suite.

59% des enfants atteignant l’âge scolaire ont une vie normale à 8 ans. Et beaucoup continueront leur existence sans symptôme…

Les effets sur les fonctions langagières, cognitives, motrices et comportementales varient beaucoup. Il faut clairement distinguer ce qui vient d’une encéphalopathie et ce qui est lié à un environnement social et comportemental insuffisant sans négliger le retentissement émotionnel dans ce genre de maladie.

Les troubles de la communication et du langage se développent parallèlement au développement de la maladie. Ils doivent être d’autant plus pris en charge que l’enfant grandit (donc survit) en terme de qualité de vie.

Au point de vue auditif, on note que les infections à répétition constituent le problème le plus fréquent à l’âge scolaire. Il y a une corrélation avec l’accélération de la maladie et la baisse des défenses immunitaires. Environ 7% des enfants auraient un déficit auditif.

On constate peu de troubles d’articulation sauf lorsque la maladie devient aiguë, en lien avec une paralysie pseudo-bulbaire. Mais il s’agit alors de dysarthrie, associée à une dysphagie. Au stade terminal de la maladie, les enfants sont souvent trop faibles et ont souvent besoin d’un amplificateur ou d’un électro-larynx. Certains ont même besoin d’être intubés et on doit alors avoir recours à une communication augmentée.

Au point de vue langage, on ne note aucun trouble lorsque l’enfant n’est que séropositif. Par contre les problèmes apparaissent plus tard surtout sur le plan expressif. Ainsi sur 68 enfants infectés, plus du tiers avaient des troubles importants du langage. Pour Tardieu, 25% des enfants de 8 à 11 ans montrait un vocabulaire déviant, mais aucun n’avait de troubles sévères. Il a également noté que les difficultés les plus importantes se trouvaient dans les foyers bilingues…

D’autres études montrent que les problèmes se situent surtout dans le rappel d’information, dans la sémantique et la syntaxe alors que le système moteur et la mémoire de travail ne semblaient pas affectés.

L’écart entre expression et compréhension a été mis en valeur par plusieurs études. Une d’entre elles montre un déclin des fonctions langagières après deux années de thérapie anti-rétrovirale mais une préservation des fonctions cognitives.

Le langage non verbal est également affecté (expression faciale, prosodie, expressions de l’émotion…) à l’exception de la pantomime.

L’acquisition de la lecture et de l’écriture peut également être perturbée par la maladie : selon Tardieu, les deux tiers des enfants ont des résultats scolaires quasi normaux. Mais des troubles spécifiques, en lien avec des lésions cérébrales diffuses ou focalisées, peuvent exister. Ainsi Cohen montre que le niveau de lecture est nettement plus faible chez les enfants atteints en particulier si on le compare avec leur niveau intellectuel. De même le niveau d’écriture est plus bas qu’en lecture ou en mathématique, même s’il n’y a pas de véritable pathologie.

L’évaluation doit se faire le plus précisément possible puis chaque année. En effet, une évaluation précise peut permettre d’apprécier les progrès de la maladie ou le succès d’un médicament. Il faut bien sûr s’intéresser à l’expression et à la compréhension du langage, mais ne pas négliger les fonctions cognitives, et motrices, l’attention, la mémoire et les acquisitions scolaires. Il ne faut surtout pas négliger que des troubles psychologiques comme l’apathie, l’anxiété voire la dépression peuvent exister chez les enfants et peuvent corrompre les résultats des tests.

Une intervention précoce est nécessaire. Selon Pressman, trois objectifs la sous-tendent : établir une ligne de base pour apprécier l’évolution de la maladie, intervenir dans le domaine langagier, aider la famille à affronter la maladie.

L’orthophoniste sera un témoin important dans l’évolution de la maladie, en particulier lorsque le langage se détériore. L’intervention se fait souvent à l’école pendant un certain temps et elle implique la constitution d’un travail en équipe avec les enseignants et les soignants.

Comme l’écrit Frank en 1997, une intervention précoce peut ralentir « la cascade de problèmes sociaux, émotionnels et scolaires associés à l’histoire de la séropositivité et du SIDA ».

Pour en savoir plus :

De nombreux articles, bien sûr récents, sont proposés en bibliographie. En particulier ceux de Wolters, de Tardieu, de Funck-Brentano….
Dan McCLOWRY

Seminars in Speech and Language, 2000, vol.21, n°1