Les troubles de l’apprentissage chez l’enfant hyperkinétique avec déficit de l’attention (THADA) – Quelle réponse orthophonique en cabinet libéral ?

Actualités Orthophoniques Mars 1999 (volume 3, n°1)
Certains mémoires de fin d’études d’orthophonie valent largement certains articles « scientifiques ». Bien sûr, ils n’apportent en général que peu de données nouvelles (faute de temps, de recul, d’expérience). Mais en contrepartie, ils proposent un large tour d’horizon d’un secteur et ceci nous permet une sorte de formation continue fort efficace.
Le mémoire d’Isabelle DEBIEVE est de ceux-là. Sans doute la partie consacrée à la partie strictement orthophonique, réalisée sous forme d’enquête auprès de professionnels libéraux, ne convainc pas et ne semble pas apporter de réponses utiles.

Par contre, la partie consacrée à la présentation du THADA (lisez : Troubles hyperkinétiques avec déficit de l’attention) nous permet de façon assez exhaustive de mieux connaître ce domaine. Et ceci est fort utile, car il n’est pas une année sans qu’un enfant ainsi étiqueté (ou non encore étiqueté…et notre tâche se double) ne consulte pour des difficultés scolaires. Connaître donc à la fois les composantes de ces troubles, y compris dans ses retombées cognitives et scolaires, les propositions d’explication et les traitements est un atout considérable pour une meilleure prise en charge de l’enfant et de sa famille.

S’agissant d’un trouble souvent mal identifié et quelque peu méconnu par les généralistes, il convient avant tout de préciser sa définition. Deux classifications existent :

Selon la Classification Internationale des maladies (CIM), sept critères sont nécessaires pour valider la notion de THADA :

• L’inattention

• L’hyperactivité

• L’impulsivité

• Un trouble qui débute avant 7 ans.

• Le caractère envahissant du trouble (divers lieux et diverses sources de constatation)

• Une altération significative du fonctionnement social ou scolaire

• Une non inclusion dans les troubles envahissants du développement

Selon le DSM IV, on doit distinguer deux syndromes individualisés mais qui doivent être présents conjointement pour parler de THADA.

• l’inattention

• l’enfant ne parvient pas à prêter attention aux détails ou fait des fautes d’étourderie.

• il a souvent du mal à soutenir son attention même pendant les jeux.

• Il semble souvent ne pas écouter

• Il ne réalise pas les consignes. Il ne termine pas ses devoirs ou ses obligations.

• Il a du mal à organiser ses activités

• Il évite les tâches nécessitant un effort mental soutenu

• Il perd souvent des objets (jouets, cahiers…)

• Il se laisse facilement distraire par des stimuli extérieurs

• Il a des oublis fréquents au quotidien

• l’hyperactivité-impulsivité

• il remue souvent les mains et les pieds, se tortille sur la chaise.

• Il se lève souvent en classe.

• Il court et grimpe partout

• Il a du mal à se tenir tranquille

• Il est « monté sur ressorts »

• Il parle souvent trop.

• Il donne souvent la réponse à une question qui n’est pas achevée.

• Il a du mal à attendre son tour

• Il interrompt souvent les autres (même dans les jeux).

Dans ces deux domaines, il faut que 6 items soient retenus à un degré inadapté pour retenir le trouble.

Dans le cas du DSM IV, il faut que les 5 éléments suivants soient présents :

• la présence d’un syndrome d’inattention ou d’hyperactivité (voir au dessus).

• Certains éléments doivent avoir été détectés avant l’âge de 7 ans.

• On doit exister une gêne fonctionnelle dans deux lieux différents de vie.

• Une altération significative du fonctionnement social ou scolaire doit être mis en évidence.

• Les symptômes ne font pas partie d’un tableau de type « trouble envahissant du développement ».

Les éléments du diagnostic sont de trois sortes :

1 – L’examen clinique

En particulier le médecin pourra relever l’existence des « soft signs » (signes neurologiques mineurs). On trouve par exemple des mouvements choréiformes chez 75% des enfants avec des THADA et 70% sont notés comme s’habillant lentement.

Parmi les examens, on peut noter la motricité fine (capacités de graphisme), l’orientation spatiale, la posture spontanée, la motricité oculaire ainsi que la motricité bucco-faciale, les syncinésies et cela en position debout et assise.

L’examen neuropsychologique s’intéressera d’abord aux fonctions cognitives Pour tester l’attention, on proposera des tâches de vigilance et des épreuves d’attention sélective (test de barrage, stroop…)

Pour la mémoire à court terme, l’épreuve d’empan, pour la mémoire à long terme, les 15 mots de Rey et la batterie BEM 144.

On essaiera également de définir le niveau du traitement de l’information (mécanismes d’encodage par exemple).

Le QI global sera comparé à ses deux composantes.

Les déficits instrumentaux seront ensuite analysés : le langage oral, la structuration temporelle et spatiale (rythmes de Mira Stamback, Bloc de Kohs , figure de Rey…).

La coordination, la motricité fine, la latéralité et le schéma corporel seront investigués de même que les praxies et les gnosies.

Toujours à propos de l’examen clinique, un examen psychopathologique (par exemple le test de la Patte Noire ) devrait éliminer des troubles de la personnalité. Un examen auditif est utile pour éviter toute autre étiologie.

Enfin, la mise en évidence de troubles d’apprentissage sera nécessaire : qualité de l’écriture, troubles du calcul et du langage écrit.

Des entretiens avec les parents, l’enfant et les enseignants sont également nécessaires afin d’apprécier en particulier la perception du problème.

Enfin des échelles d’observation ont été établies afin de préciser les principales composantes du trouble (voir celle de YALE dans la rubrique « la boite à outils » de ce numéro).

En ce qui concerne l ?épidémiologie, on constate qu’il y a environ 3 à 5% des enfants qui souffrent de ces troubles et qu’il s’agit surtout de garçons (à 3 pour 1). L’âge moyen de survenue est évalué à 3,2 ans. Mais il ne s’agit que d’une approximation car la première consultation n’a en général lieu que vers 6/7 ans lors de l’apparition des difficultés scolaires.

On doit également noter, sans qu’il y ait une explication déterminante que 77% des enfants vivaient dans des situations socio-économiques « anormales ».

Dans le prochain numéro, nous développerons les symptômes et les traitements possibles.
Isabelle DEBIEVE
Institut d’Orthophonie de Lille – 1997